Jazz live
Publié le 5 Nov 2013

Tampere : dernières notes, projets à venir

Un dimanche à Tampere, pendant le festival, c’est d’abord trois grands concerts dans l’après-midi, puis une longue soirée au « Clubi », et l’occasion de se pencher sur quelques-uns des aspects de ce festival, qui en est à sa trente deuxième édition.

 

J’ai retrouvé la trace d’un trio français présent en 1982 à la première édition du festival (1). Et quand on regarde la programmation des années qui ont suivi jusqu’à aujourd’hui, on trouve nombre de musiciens venus de l’hexagone. Une régularité, une fidélité, qui doit pouvoir s’expliquer par de nombreuses causes, la dernière en date étant la présence à Helsinki de Charles Gil, qui ne ménage pas ses efforts pour mettre en place des tournées françaises ou franco-finlandaises, avec (comme c’est le cas cette année) le soutien de l’Institut Français de Finlande, en la personne de Georges Diener.(2) « Pas un projet qui ne soit suivi et aidé » me confie Charles, et de lister ceux qui vont arriver, dont les plus éloignés cherchent évidemment encore leurs dates : du 8 au 15 mars 2014, Mikko Innanen & Innkvisitio partagera l’affiche avec le trio « Mediums » de Vincent Courtois (déjà 5 dates confirmées), cependant que le trio de Mikko sera en France du 19 au 24 novembre 2014. Viendront ensuite le trio de Laurent Dehors « Political Songs » (du 16 au 26 mars, à construire), puis du 29 septembre au 8 octobre le trio Journal Intime « Plays Jimi Hendrix », et enfin en octobre/novembre (dates à préciser) le groupe d’Hubert Dupont « Jasmin Trio », dont le disque vient de recevoir d’un peu partout une volée d’éloges mérités. On se doute que ce travail, discret et très efficace, peut-être moins médiatisé chez nous que des opérations plus voyantes, permet non seulement l’exportation de nos musiciens et de leurs projets les plus inventifs, mais aussi des rencontres, des échanges, des constructions de groupes internationaux. Il est donc nécessaire de veiller aux financement des aides qui les rendent possible. Dans ce domaine, l’inquiétude est grande actuellement, de voir les crédits drastiquement à la baisse, ce qui reviendrait à couper les ailes à la création et à la diffusion de musiciens qui de demandent qu’à faire entendre leur musique, ici et ailleurs. Et qu’on ne vienne pas nous dire que ces économies ridiculement modestes vont sauver notre système. Déjà Victor Hugo vitupérait contre ses amis politiques (de droite) quand ils voulaient réduire les sommes consacrées aux Arts et aux Lettres, plus que modestes, dont le poids dans la balance générale est proche de rien du tout. On ne touche pas à rien du tout. C’est un rien qui fait tenir le reste.

 

Mais nous avions rendez-vous avec Joëlle Léandre (b), Lotte Anker (as, ss) et Raymond Strid (dm). Jouer à 14.00 n’a rien d’évident, même si la grande salle du festival donne le change. Une heure de musique improvisée de haute tenue, tout à fait dans le ton de ce que nous disions avant-hier, à la recherche permanente du sens et de la forme, avec une Léandre dans sa vocalité bluesy, toujours très « low down » (associations « libres » de mots sans suite apparente), une Lotte Anker qui joue beaucoup d’alto et qui cherche constamment la construction de phrases courtes et répétées propres à induire des échos, et un batteur que nous ne connaissions pas, et qui s’inscrit là-dedans avec une belle simplicité. Au final de ces six ou sept pièces, Joëlle a trouvé une phrase mélodique qu’on aurait cru échappée d’un concerto de Saint Saens. Concert suivi par un public de fidèles, et qui n’ont pas bougé pendant une heure.

 

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  Lotte Anker et Joëlle Léandre pendant la balance

 

Nous avions déjà entendu récemment (à Brest) le trio Reijseger/Fraanje/Sylla, et apprécié leur répertoire, longuement peaufiné et mis au point. Ernst Reijseger (cello, voc), Harmen Frannje (p, voc) et Molla Sylla (perc, voc) ont donc offert leur spectacle au public de Tampere, une heure d’émotions et de régals musicaux, où c’est Ernst qui prend sur lui la part maudite et douloureuse de l’Afrique, laissant à Molla Sylla celle du soleil, de la nonchalance et du rêve, Harmen se glissant plutôt du côté féminin de la chose. On comprend que cette musique, qui peut se rattacher au courant de la « world music » trouve sa place dans les festivals de jazz « ouverts » tant la qualité de ce qui est proposé tranche avec l’habituelle démonstration effectuée sous le signe du métissage.

 

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                        Ernst Reijseger

 

Restait, non sans curiosité, à voir ce que donnerait le quartet dirigé par Jack DeJohnette avec Don Byron, soit Jack DeJohnette (dm), Don Byron (cl, ts), George Colligan (pocket-tp, claviers) et Jerome Harris (el-b). Disons que ce fut… presque convaincant. Ayant choisi de jouer des thèmes d’Ahmad Jamal, ou de son cru, ou même d’Ornette Coleman, DeJohnette a semblé ravi de driver cette petite formation, où Don Byron progresse au saxophone ténor (nous comparons par rapport au dernier Europa Jazz du Mans, en mai dernier) et développe de longs solos bien construits à la clarinette. George Colligan n’est pas Médéric Collignon, mais il se défend à la trompette de poche, et Jerome Harris est, bien entendu, parfait dans un rôle de bassiste qui assure pour les autres. Quant à monsieur Jack DeJohnette, c’est un grand privilège que de pouvoir le voir et l’entendre pendant une heure, épaules quasi immobiles, tout se passant dans l’avant-bras et le poignet, d’une affolante précision rythmique, capable de faire entendre le moindre son et d’expédier des « pêches » d’une rare violence. 

 

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                   Don Byron sur les écrans

 

Ainsi s’achevait pour nous ce festival tout au nord de l’Europe, dont nous avons beaucoup apprécié l’ambiance et les intentions artistiques. 

 

(1) Impossible de retrouver le noms des musiciens : j’ai vu un 33 tours dédicacé sur place en 1982, dans un magasin, mais peut-être était-ce en dehors du festival. Et je n’ai pas noté le nom des musiciens…

(2) Conseiller de coopération de d’action culturelle près l’Ambassade de France en Finlande, directeur de l’Institut Français de Finlande.

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Un dimanche à Tampere, pendant le festival, c’est d’abord trois grands concerts dans l’après-midi, puis une longue soirée au « Clubi », et l’occasion de se pencher sur quelques-uns des aspects de ce festival, qui en est à sa trente deuxième édition.

 

J’ai retrouvé la trace d’un trio français présent en 1982 à la première édition du festival (1). Et quand on regarde la programmation des années qui ont suivi jusqu’à aujourd’hui, on trouve nombre de musiciens venus de l’hexagone. Une régularité, une fidélité, qui doit pouvoir s’expliquer par de nombreuses causes, la dernière en date étant la présence à Helsinki de Charles Gil, qui ne ménage pas ses efforts pour mettre en place des tournées françaises ou franco-finlandaises, avec (comme c’est le cas cette année) le soutien de l’Institut Français de Finlande, en la personne de Georges Diener.(2) « Pas un projet qui ne soit suivi et aidé » me confie Charles, et de lister ceux qui vont arriver, dont les plus éloignés cherchent évidemment encore leurs dates : du 8 au 15 mars 2014, Mikko Innanen & Innkvisitio partagera l’affiche avec le trio « Mediums » de Vincent Courtois (déjà 5 dates confirmées), cependant que le trio de Mikko sera en France du 19 au 24 novembre 2014. Viendront ensuite le trio de Laurent Dehors « Political Songs » (du 16 au 26 mars, à construire), puis du 29 septembre au 8 octobre le trio Journal Intime « Plays Jimi Hendrix », et enfin en octobre/novembre (dates à préciser) le groupe d’Hubert Dupont « Jasmin Trio », dont le disque vient de recevoir d’un peu partout une volée d’éloges mérités. On se doute que ce travail, discret et très efficace, peut-être moins médiatisé chez nous que des opérations plus voyantes, permet non seulement l’exportation de nos musiciens et de leurs projets les plus inventifs, mais aussi des rencontres, des échanges, des constructions de groupes internationaux. Il est donc nécessaire de veiller aux financement des aides qui les rendent possible. Dans ce domaine, l’inquiétude est grande actuellement, de voir les crédits drastiquement à la baisse, ce qui reviendrait à couper les ailes à la création et à la diffusion de musiciens qui de demandent qu’à faire entendre leur musique, ici et ailleurs. Et qu’on ne vienne pas nous dire que ces économies ridiculement modestes vont sauver notre système. Déjà Victor Hugo vitupérait contre ses amis politiques (de droite) quand ils voulaient réduire les sommes consacrées aux Arts et aux Lettres, plus que modestes, dont le poids dans la balance générale est proche de rien du tout. On ne touche pas à rien du tout. C’est un rien qui fait tenir le reste.

 

Mais nous avions rendez-vous avec Joëlle Léandre (b), Lotte Anker (as, ss) et Raymond Strid (dm). Jouer à 14.00 n’a rien d’évident, même si la grande salle du festival donne le change. Une heure de musique improvisée de haute tenue, tout à fait dans le ton de ce que nous disions avant-hier, à la recherche permanente du sens et de la forme, avec une Léandre dans sa vocalité bluesy, toujours très « low down » (associations « libres » de mots sans suite apparente), une Lotte Anker qui joue beaucoup d’alto et qui cherche constamment la construction de phrases courtes et répétées propres à induire des échos, et un batteur que nous ne connaissions pas, et qui s’inscrit là-dedans avec une belle simplicité. Au final de ces six ou sept pièces, Joëlle a trouvé une phrase mélodique qu’on aurait cru échappée d’un concerto de Saint Saens. Concert suivi par un public de fidèles, et qui n’ont pas bougé pendant une heure.

 

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  Lotte Anker et Joëlle Léandre pendant la balance

 

Nous avions déjà entendu récemment (à Brest) le trio Reijseger/Fraanje/Sylla, et apprécié leur répertoire, longuement peaufiné et mis au point. Ernst Reijseger (cello, voc), Harmen Frannje (p, voc) et Molla Sylla (perc, voc) ont donc offert leur spectacle au public de Tampere, une heure d’émotions et de régals musicaux, où c’est Ernst qui prend sur lui la part maudite et douloureuse de l’Afrique, laissant à Molla Sylla celle du soleil, de la nonchalance et du rêve, Harmen se glissant plutôt du côté féminin de la chose. On comprend que cette musique, qui peut se rattacher au courant de la « world music » trouve sa place dans les festivals de jazz « ouverts » tant la qualité de ce qui est proposé tranche avec l’habituelle démonstration effectuée sous le signe du métissage.

 

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                        Ernst Reijseger

 

Restait, non sans curiosité, à voir ce que donnerait le quartet dirigé par Jack DeJohnette avec Don Byron, soit Jack DeJohnette (dm), Don Byron (cl, ts), George Colligan (pocket-tp, claviers) et Jerome Harris (el-b). Disons que ce fut… presque convaincant. Ayant choisi de jouer des thèmes d’Ahmad Jamal, ou de son cru, ou même d’Ornette Coleman, DeJohnette a semblé ravi de driver cette petite formation, où Don Byron progresse au saxophone ténor (nous comparons par rapport au dernier Europa Jazz du Mans, en mai dernier) et développe de longs solos bien construits à la clarinette. George Colligan n’est pas Médéric Collignon, mais il se défend à la trompette de poche, et Jerome Harris est, bien entendu, parfait dans un rôle de bassiste qui assure pour les autres. Quant à monsieur Jack DeJohnette, c’est un grand privilège que de pouvoir le voir et l’entendre pendant une heure, épaules quasi immobiles, tout se passant dans l’avant-bras et le poignet, d’une affolante précision rythmique, capable de faire entendre le moindre son et d’expédier des « pêches » d’une rare violence. 

 

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                   Don Byron sur les écrans

 

Ainsi s’achevait pour nous ce festival tout au nord de l’Europe, dont nous avons beaucoup apprécié l’ambiance et les intentions artistiques. 

 

(1) Impossible de retrouver le noms des musiciens : j’ai vu un 33 tours dédicacé sur place en 1982, dans un magasin, mais peut-être était-ce en dehors du festival. Et je n’ai pas noté le nom des musiciens…

(2) Conseiller de coopération de d’action culturelle près l’Ambassade de France en Finlande, directeur de l’Institut Français de Finlande.

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Un dimanche à Tampere, pendant le festival, c’est d’abord trois grands concerts dans l’après-midi, puis une longue soirée au « Clubi », et l’occasion de se pencher sur quelques-uns des aspects de ce festival, qui en est à sa trente deuxième édition.

 

J’ai retrouvé la trace d’un trio français présent en 1982 à la première édition du festival (1). Et quand on regarde la programmation des années qui ont suivi jusqu’à aujourd’hui, on trouve nombre de musiciens venus de l’hexagone. Une régularité, une fidélité, qui doit pouvoir s’expliquer par de nombreuses causes, la dernière en date étant la présence à Helsinki de Charles Gil, qui ne ménage pas ses efforts pour mettre en place des tournées françaises ou franco-finlandaises, avec (comme c’est le cas cette année) le soutien de l’Institut Français de Finlande, en la personne de Georges Diener.(2) « Pas un projet qui ne soit suivi et aidé » me confie Charles, et de lister ceux qui vont arriver, dont les plus éloignés cherchent évidemment encore leurs dates : du 8 au 15 mars 2014, Mikko Innanen & Innkvisitio partagera l’affiche avec le trio « Mediums » de Vincent Courtois (déjà 5 dates confirmées), cependant que le trio de Mikko sera en France du 19 au 24 novembre 2014. Viendront ensuite le trio de Laurent Dehors « Political Songs » (du 16 au 26 mars, à construire), puis du 29 septembre au 8 octobre le trio Journal Intime « Plays Jimi Hendrix », et enfin en octobre/novembre (dates à préciser) le groupe d’Hubert Dupont « Jasmin Trio », dont le disque vient de recevoir d’un peu partout une volée d’éloges mérités. On se doute que ce travail, discret et très efficace, peut-être moins médiatisé chez nous que des opérations plus voyantes, permet non seulement l’exportation de nos musiciens et de leurs projets les plus inventifs, mais aussi des rencontres, des échanges, des constructions de groupes internationaux. Il est donc nécessaire de veiller aux financement des aides qui les rendent possible. Dans ce domaine, l’inquiétude est grande actuellement, de voir les crédits drastiquement à la baisse, ce qui reviendrait à couper les ailes à la création et à la diffusion de musiciens qui de demandent qu’à faire entendre leur musique, ici et ailleurs. Et qu’on ne vienne pas nous dire que ces économies ridiculement modestes vont sauver notre système. Déjà Victor Hugo vitupérait contre ses amis politiques (de droite) quand ils voulaient réduire les sommes consacrées aux Arts et aux Lettres, plus que modestes, dont le poids dans la balance générale est proche de rien du tout. On ne touche pas à rien du tout. C’est un rien qui fait tenir le reste.

 

Mais nous avions rendez-vous avec Joëlle Léandre (b), Lotte Anker (as, ss) et Raymond Strid (dm). Jouer à 14.00 n’a rien d’évident, même si la grande salle du festival donne le change. Une heure de musique improvisée de haute tenue, tout à fait dans le ton de ce que nous disions avant-hier, à la recherche permanente du sens et de la forme, avec une Léandre dans sa vocalité bluesy, toujours très « low down » (associations « libres » de mots sans suite apparente), une Lotte Anker qui joue beaucoup d’alto et qui cherche constamment la construction de phrases courtes et répétées propres à induire des échos, et un batteur que nous ne connaissions pas, et qui s’inscrit là-dedans avec une belle simplicité. Au final de ces six ou sept pièces, Joëlle a trouvé une phrase mélodique qu’on aurait cru échappée d’un concerto de Saint Saens. Concert suivi par un public de fidèles, et qui n’ont pas bougé pendant une heure.

 

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  Lotte Anker et Joëlle Léandre pendant la balance

 

Nous avions déjà entendu récemment (à Brest) le trio Reijseger/Fraanje/Sylla, et apprécié leur répertoire, longuement peaufiné et mis au point. Ernst Reijseger (cello, voc), Harmen Frannje (p, voc) et Molla Sylla (perc, voc) ont donc offert leur spectacle au public de Tampere, une heure d’émotions et de régals musicaux, où c’est Ernst qui prend sur lui la part maudite et douloureuse de l’Afrique, laissant à Molla Sylla celle du soleil, de la nonchalance et du rêve, Harmen se glissant plutôt du côté féminin de la chose. On comprend que cette musique, qui peut se rattacher au courant de la « world music » trouve sa place dans les festivals de jazz « ouverts » tant la qualité de ce qui est proposé tranche avec l’habituelle démonstration effectuée sous le signe du métissage.

 

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                        Ernst Reijseger

 

Restait, non sans curiosité, à voir ce que donnerait le quartet dirigé par Jack DeJohnette avec Don Byron, soit Jack DeJohnette (dm), Don Byron (cl, ts), George Colligan (pocket-tp, claviers) et Jerome Harris (el-b). Disons que ce fut… presque convaincant. Ayant choisi de jouer des thèmes d’Ahmad Jamal, ou de son cru, ou même d’Ornette Coleman, DeJohnette a semblé ravi de driver cette petite formation, où Don Byron progresse au saxophone ténor (nous comparons par rapport au dernier Europa Jazz du Mans, en mai dernier) et développe de longs solos bien construits à la clarinette. George Colligan n’est pas Médéric Collignon, mais il se défend à la trompette de poche, et Jerome Harris est, bien entendu, parfait dans un rôle de bassiste qui assure pour les autres. Quant à monsieur Jack DeJohnette, c’est un grand privilège que de pouvoir le voir et l’entendre pendant une heure, épaules quasi immobiles, tout se passant dans l’avant-bras et le poignet, d’une affolante précision rythmique, capable de faire entendre le moindre son et d’expédier des « pêches » d’une rare violence. 

 

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                   Don Byron sur les écrans

 

Ainsi s’achevait pour nous ce festival tout au nord de l’Europe, dont nous avons beaucoup apprécié l’ambiance et les intentions artistiques. 

 

(1) Impossible de retrouver le noms des musiciens : j’ai vu un 33 tours dédicacé sur place en 1982, dans un magasin, mais peut-être était-ce en dehors du festival. Et je n’ai pas noté le nom des musiciens…

(2) Conseiller de coopération de d’action culturelle près l’Ambassade de France en Finlande, directeur de l’Institut Français de Finlande.

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Un dimanche à Tampere, pendant le festival, c’est d’abord trois grands concerts dans l’après-midi, puis une longue soirée au « Clubi », et l’occasion de se pencher sur quelques-uns des aspects de ce festival, qui en est à sa trente deuxième édition.

 

J’ai retrouvé la trace d’un trio français présent en 1982 à la première édition du festival (1). Et quand on regarde la programmation des années qui ont suivi jusqu’à aujourd’hui, on trouve nombre de musiciens venus de l’hexagone. Une régularité, une fidélité, qui doit pouvoir s’expliquer par de nombreuses causes, la dernière en date étant la présence à Helsinki de Charles Gil, qui ne ménage pas ses efforts pour mettre en place des tournées françaises ou franco-finlandaises, avec (comme c’est le cas cette année) le soutien de l’Institut Français de Finlande, en la personne de Georges Diener.(2) « Pas un projet qui ne soit suivi et aidé » me confie Charles, et de lister ceux qui vont arriver, dont les plus éloignés cherchent évidemment encore leurs dates : du 8 au 15 mars 2014, Mikko Innanen & Innkvisitio partagera l’affiche avec le trio « Mediums » de Vincent Courtois (déjà 5 dates confirmées), cependant que le trio de Mikko sera en France du 19 au 24 novembre 2014. Viendront ensuite le trio de Laurent Dehors « Political Songs » (du 16 au 26 mars, à construire), puis du 29 septembre au 8 octobre le trio Journal Intime « Plays Jimi Hendrix », et enfin en octobre/novembre (dates à préciser) le groupe d’Hubert Dupont « Jasmin Trio », dont le disque vient de recevoir d’un peu partout une volée d’éloges mérités. On se doute que ce travail, discret et très efficace, peut-être moins médiatisé chez nous que des opérations plus voyantes, permet non seulement l’exportation de nos musiciens et de leurs projets les plus inventifs, mais aussi des rencontres, des échanges, des constructions de groupes internationaux. Il est donc nécessaire de veiller aux financement des aides qui les rendent possible. Dans ce domaine, l’inquiétude est grande actuellement, de voir les crédits drastiquement à la baisse, ce qui reviendrait à couper les ailes à la création et à la diffusion de musiciens qui de demandent qu’à faire entendre leur musique, ici et ailleurs. Et qu’on ne vienne pas nous dire que ces économies ridiculement modestes vont sauver notre système. Déjà Victor Hugo vitupérait contre ses amis politiques (de droite) quand ils voulaient réduire les sommes consacrées aux Arts et aux Lettres, plus que modestes, dont le poids dans la balance générale est proche de rien du tout. On ne touche pas à rien du tout. C’est un rien qui fait tenir le reste.

 

Mais nous avions rendez-vous avec Joëlle Léandre (b), Lotte Anker (as, ss) et Raymond Strid (dm). Jouer à 14.00 n’a rien d’évident, même si la grande salle du festival donne le change. Une heure de musique improvisée de haute tenue, tout à fait dans le ton de ce que nous disions avant-hier, à la recherche permanente du sens et de la forme, avec une Léandre dans sa vocalité bluesy, toujours très « low down » (associations « libres » de mots sans suite apparente), une Lotte Anker qui joue beaucoup d’alto et qui cherche constamment la construction de phrases courtes et répétées propres à induire des échos, et un batteur que nous ne connaissions pas, et qui s’inscrit là-dedans avec une belle simplicité. Au final de ces six ou sept pièces, Joëlle a trouvé une phrase mélodique qu’on aurait cru échappée d’un concerto de Saint Saens. Concert suivi par un public de fidèles, et qui n’ont pas bougé pendant une heure.

 

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  Lotte Anker et Joëlle Léandre pendant la balance

 

Nous avions déjà entendu récemment (à Brest) le trio Reijseger/Fraanje/Sylla, et apprécié leur répertoire, longuement peaufiné et mis au point. Ernst Reijseger (cello, voc), Harmen Frannje (p, voc) et Molla Sylla (perc, voc) ont donc offert leur spectacle au public de Tampere, une heure d’émotions et de régals musicaux, où c’est Ernst qui prend sur lui la part maudite et douloureuse de l’Afrique, laissant à Molla Sylla celle du soleil, de la nonchalance et du rêve, Harmen se glissant plutôt du côté féminin de la chose. On comprend que cette musique, qui peut se rattacher au courant de la « world music » trouve sa place dans les festivals de jazz « ouverts » tant la qualité de ce qui est proposé tranche avec l’habituelle démonstration effectuée sous le signe du métissage.

 

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Restait, non sans curiosité, à voir ce que donnerait le quartet dirigé par Jack DeJohnette avec Don Byron, soit Jack DeJohnette (dm), Don Byron (cl, ts), George Colligan (pocket-tp, claviers) et Jerome Harris (el-b). Disons que ce fut… presque convaincant. Ayant choisi de jouer des thèmes d’Ahmad Jamal, ou de son cru, ou même d’Ornette Coleman, DeJohnette a semblé ravi de driver cette petite formation, où Don Byron progresse au saxophone ténor (nous comparons par rapport au dernier Europa Jazz du Mans, en mai dernier) et développe de longs solos bien construits à la clarinette. George Colligan n’est pas Médéric Collignon, mais il se défend à la trompette de poche, et Jerome Harris est, bien entendu, parfait dans un rôle de bassiste qui assure pour les autres. Quant à monsieur Jack DeJohnette, c’est un grand privilège que de pouvoir le voir et l’entendre pendant une heure, épaules quasi immobiles, tout se passant dans l’avant-bras et le poignet, d’une affolante précision rythmique, capable de faire entendre le moindre son et d’expédier des « pêches » d’une rare violence. 

 

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                   Don Byron sur les écrans

 

Ainsi s’achevait pour nous ce festival tout au nord de l’Europe, dont nous avons beaucoup apprécié l’ambiance et les intentions artistiques. 

 

(1) Impossible de retrouver le noms des musiciens : j’ai vu un 33 tours dédicacé sur place en 1982, dans un magasin, mais peut-être était-ce en dehors du festival. Et je n’ai pas noté le nom des musiciens…

(2) Conseiller de coopération de d’action culturelle près l’Ambassade de France en Finlande, directeur de l’Institut Français de Finlande.