Hier, 16 janvier, au Sunset, Lavender Walk avec Christelle Raquillet, Thomas Gaucher et Cyril Drapé ; au Sunside, Triple Fever avec Benoît Delbecq, Étienne Renard et Guilhem Flouzat.
Du trio Lavender Walk, je connaisais déjà le guitariste Thomas Gaucher qui m’avait fait entendre un album de fin d’études au CNSM où il entra en 2019. S’y trouvait déjà sollicité le contrebassiste Cyril Drapé et y était rendu hommage à la flûtiste Chritelle Raquillet, tous compagnons d’étude. Les voici réunis au sein d’un trio qui fait ouvertement référence aux trios de Jimmy Giuffre avec Jim Hall. Ambiance chambriste, petit clin d’œil du côté du folk avec en fin de set The Train And The River et un autre vers l’iconoclasme de Carla Bley dont est repris le Jesus Maria. Autres emprunts à Oscar Pettiford, Fred Hersch et Richard Rodgers, plus quelques originaux, sur un répertoire d’une belle cohérence dans cet esprit chambriste résultant de l’absence de batterie et d’une conception chantante de la contrebasse. Thomas Gaucher évoque évidemment Jim Hall, pas seulement du fait de la situation orchestrale, mais combinée à une vaste culture guitariste (de Frisell à Rosenwinkel) et à une vraie virtuosité, une musicalité toute en discrétion timbrale, sincérité mélodique et science harmonique. Aux flûtes traversières – elle sollicite volontiers la flûte basse –, Christelle Raquillet est une improvisatrice accomplie qui, par des phrases jamais téléphonées et toujours nécessaires, échappe aux clichés de la réthorique jazz. Chanteuse sur quelques titres à l’intonation assurée, il lui reste pour servir les chansons qu’elle interprète cette même qualité d’articulation et d’expression dont elle fait preuve sur la flûte (et qu’il convient de viser lorsqu’on se réclame dans le programme de l’influence Joni Mitchell).
Le temps d’escalader quatre à quatre les marches qui séparent le Sunset du Sunside et je m’assieds juste à temps pour entendre, à vrai dire pour réentendre, l’équilatérale Triple Fever de Benoît Delbecq (piano), Étienne Renard (contrebasse) et Guilhem Flouzat (batterie). Ce trio ayant déjà été chroniqué deux fois dans ces pages il y a un an par Xavier Prévost et moi-même, je m’abandonne simplement au plaisir, étourdissement où vous plonge cette lente fièvre, ces images qu’ils font défiler selon des vitesses et des directions changeantes et autonomes, les lois de la probabilité les autorisant ici et là à de rares tutti d’autant plus jubilatoires que sont grandes la qualité de timbres individuels et leurs combinaisons. Pas de second set, un départ matinal pour la Bretagne m’incitant à regagner ma banlieue sans tarder. Mon prochain concert: dimanche 21 janvier en après-midi, à Langonnet, Centre Bretagne, avec le quintette d’Hélène Labarrière. Je m’en réjouis d’avance, et les Parisiens de même qui pourront l’entendre la veille à la Maison de la radio dans le cadre de Jazz sur le Vif. Franck Bergerot