Une invitée de la Litanie des cimes
Hôte de la Galerie Marbleu, le trio La Litanie des cimes d’Élodie Pasquier (clarinettes), Clément Janinet (violons) et Bruno Ducret (violoncelle) accueillait il y a quelques jours la chanteuse malienne Mah Damba.
Début de concert avec le seul trio, ce qui est déjà beaucoup. Beaucoup d’idées, beaucoup de feeling, beaucoup d’entente et d’ensemble pour beaucoup d’imprévus, moins comme bévues que comme surprises, de bonnes surprises, celles que l’on recherchait, celles que l’on provoquait et celles que l’on n’attendait pas vraiment et qui réjouissent musiciens comme public. Avec un appétit et un métier des timbres et des gestes requis par ceux-ci, relevant de la musique de chambre, elle qui généralement se prépare à la table, sur papier avant qu’un compositeur ne la soumette à ses interprètes, mais qui là se fait le fruit d’un travail collectif et non clos, ouvert à l’instantané, à la projection de l’instant, du geste improvisé, avec cette intimité du son acoustique, de la proximité des sons. On pense à l’orchestre de chambre, à cette longue et ancienne tradition, qui pourrait être lourde mais a ici légèreté de l’artisanat et la souplesse démocratique propre à la petite formation. Un orchestre qui s’ouvre en outre à d’autres traditions, orales, campagnardes, savantes d’autre savoirs, d’autres sons, d’autres rythmes, l’archet effleurant la corde au profit d’harmoniques nouvelles, ou la battant, évocation de l’Afrique des monocordes et des cithares sur tronc, une Afrique notamment regardée avec les yeux de Steve Reich, mais aussi entendue de l’oreille avertie de Clément Janinet qui n’est pas plus étranger aux musiques du Morvan…
Puis Mah Damba s’assied parmi eux, avec ce sens de la parure que les musiciens de jazz ont rarement, ou tellement peu que l’on préfère qu’ils s’en abstiennent, parce qu’ils n’auraient pas ce naturel, cette tendre autorité, cette intense et paisible présence qui va avec cette voix projetée sans effort dans toutes les nuances. Et voici nos musiciens en retrait, en position d’accompagnement, au service, sans pour autant se laisser brider par une précise partition, leur complicité simplement tendue vers la mise en valeur du chant, de son timbre, ses mélodies et ses rythmes. Franck Bergerot
Le trio à retrouver le 18 juin au Périscope de Lyon. Galerie Marbleu à visiter au 26 de la rue Delta à Paris 9e à deux pas de Barbès-Rochechouart.