Jazz Magazine n°671 - avril 2015
Un grand éclat de rire par Frédéric Goaty
“Un club de jazz, ce sont quatre types sur scène qui prennent plus de plaisir que les cinquante personnes du public. Ils jouent tous une chanson différente en même temps, à des tempos différents, dans une tonalité différente.
Ils appellent ça jazz… C’est du grand n’importe quoi !” Cette remarquable analyse du guitariste rock Noel Gallagher circule sur le Net depuis quelques semaines.
Faut-il en rire ou en pleurer ? Ça se discute. Partagée sur sa page Facebook par un ami (un vrai), elle provoqua d’emblée la réaction d’un autre ami : “C’est qui ce trou du c… ?” Ainsi, Richard Dessabledolone [le nom a été changé] n’avait jamais entendu parler du grand frère de Liam Gallagher… Ce qui n’a pas manqué de surprendre, voire de choquer d’autres commentateurs.
Mais au nom de quoi faudrait-il que tout le monde sache qui est Rory, pardon, Noel Gallagher ? Il y a quelques années, j’avais osé raconter à Herbie Hancock cette vieille blague de musicien : “Quelle est la différence entre un musicien rock et un musicien jazz ? L’un joue trois accords devant mille personnes et l’autre mille accords devant trois personnes.” J’entends encore son grand éclat de rire, qui disait l’humour, la lucidité, l’autodérision, l’humilité, bref la force – j’ai failli écrire supériorité – des vrais musiciens, ceux qui jouent de la musique, pas à la musique. Comme disait Clark Terry : “Je suis trop vieux pour faire le mac, et trop jeune pour mourir, alors je vais juste continuer de jouer.”
Ce numéro est dédié à la mémoire de Valérie Crinière, militante humble, dévouée et rieuse de la cause du jazz.